Erreurs judiciaires (Bibliographie)
Denis Salas, magistrat, président de l'association française pour l'histoire de la justice, directeur de la revue "Les cahiers de la justice", vient de publier aux éditions Dalloz un petit (par le format) livre intitulé : Erreurs judiciaires. (livre format papier) (livre numérique) (cf. aussi la rubrique sur ce blog)
Dans l'introduction appelée "Erreur liberticide, erreur d'impunité", D. Salas parle de l'erreur comme une "ombre omniprésente" mais insuffisamment analysée, essaie d'en définir les contours, propose de "penser l'acte de justice comme une activité à risque", et de "regarder en face un système décisionnel pensé à une autre époque pour une société qui n'est plus la nôtre."
Le premier chapitre est intitulé : "La condamnation d'innocents."
D. Salas rappelle que le débat sur d'éventuelles erreurs judiciaires a commencé quand un espace public a été autorisé à juger les décisions publiques.
Mais aussi que c'est parfois l'opinion publique qui est prompte à condamner, avant même la preuve de la culpabilité. (lire aussi ici)
Puis il revisite quelques affaires célèbres.
Il analyse ensuite l'approche dans les pays de common law, notamment les Etats-Unis. (lire aussi ici, ici) Il considère que, parfois, "une erreur judiciaire résulte d'une panique morale qui fait pression sur la police et le procureur", et qu'il en résulte des procès biaisés sur de nombreux plans y compris le plaider coupable.
D. Salas retrace enfin trois procès en révision (Dills, Sécher, et Machin - sur ce dernier cas cf. ici).
Le chapitre deux est intitulé : "L'impunité des coupables".
D. Salas affirme que quand l'auteur d'un crime n'est pas puni, "c'est un scandale dont la résonance est aussi forte en intensité que celui qui frappe l'innocent bafoué". C'est alors que "le visage de l'erreur judiciaire se dédouble". Et que la défaillance de l'Etat à jouer son rôle "effraie comme si un trou béant pouvait emporter la société dans le chaos."
C'est aussi l'occassion, pour D. Salas, de se pencher sur la place et le rôle des victimes.
Et de s'arrêter un instant sur l'affaire Bonnal, du nom de cet homme, délinquant récidiviste, qui dans un dossier précis avait été remis en liberté, ce qui avait entraîné un déchainement de haine vis à vis des magistrats et de l'institution judiciaire, jusqu'au plus haut niveau de l'Etat, avant... son acquittement par la cour d'assises. Que plus personne n'avait commenté.
D'où des développements sur l'exposition des magistrats.
Le chapitre trois est intitulé : "Comment réparer, comment prévenir".
D. Salas analyse le processus de révision des décisions de condamnation. (sur le sujet cf. ici, ici, ici)
Et il pose la question de l'éventuelle révision des décisions de relaxe et d'acquittement.
Il aborde ensuite la question de la détention injustifiée.
Puis celle de la responsabilité de l'Etat en cas de dysfonctionnement de la justice.
Il s'arrête sur les contours de la faute disciplinaire.
S'interrogeant sur la prévention des erreurs judiciaires, D. Salas se demande comment mettre en place une "culture de la fiabilité".
C'est un livre plein de réflexions utiles que nous propose D. Salas. Alors que la justice est de plus en plus au coeur des débats, alors que les exigences vis à vis d'elle sont de plus en plus fortes, il est indispensable de bien maîtriser les notions qui sont utilisée, pas toujours de façon adéquate.
En cela le livre de D. Salas intéressera tous ceux qui se sentent de près ou de loin concernés par la justice. Et veulent privilégier la réflexion à l'émotion.
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D. Salas est également l'auteur de : "La volonté de punir, essai sur le populisme pénal". (cf. ici)
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