La cour de révision de la cour de cassation annule une décision de cour d'assises
Le code de procédure pénale, dans ses articles 622 et suivants (textes ici), prévoit une procédure de révision des condamnations pénales. Nous en avons déjà présenté les grandes lignes (lire ici, ici, et ici, et cf. la rubrique dédiée).
En juillet 2013, la commission de révision des condamnations pénales a statué sur le cas de Monsieur Iacono, condamné en 2011 par une cour d'assises d'appel à 9 années d'emprisonnement pour viol sur son petit-fils. Dans sa décision (texte intégral ici) elle a estimé au terme de sa motivation, après avoir notamment relevé que le petit-fils est revenu sur ses accusations contre son grand-père :
"les rétractations réitérées de G. X..., dont les déclarations jugées crédibles au cours de l’instruction ont été le principal élément à charge contre C. X..., corroborées par les autres éléments ci-dessus rappelés, constituent des éléments nouveaux, inconnus de la cour d’assises qui a prononcé la condamnation, susceptibles de faire naître un doute sur la culpabilité de C. X... et justifient la saisine de la Cour de révision".
Et par voie de conséquence, c'est la chambre criminelle statuant comme cour de révision qui a statué.
Elle vient de rendre son arrêt ce 18 février 2014 (texte intégral ici).
La cour de cassation a retenu, en résumé, que dans le dossier initial il n'y avait aucun élément médical prouvant la réalité de l'agression sexuelle, que l'enfant avait été estimé crédible par les experts, que Monsieur Iacono a toujours nié les faits, que le petit-fils a plus tard déclaré avoir menti à l'époque de la dénonciation de l'agresion à ses parents, qu'il présente des troubles de la personnalité, qu'à la date des faits il était en détresse psychique dans un environnement familial perturbé, qu'il n'existe pas de mobile financier à ses rétractations, qu'il existe donc un élément nouveau (le revirement du plaignant) de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné.
Par voie de conséquence elle a annulé l'arrêt de la cour d'assises de 2013 et désigné une nouvelle cour d'assises chargée de rejuger l'affaire.
Cela appelle quelques brefs commentaires.
Devant une cour d'assises, toutes les déclarations doivent être reçues puis analysées avec distance et prudence. Il en va ainsi, notamment, des propos des plaignants. Cela est d'autant plus nécessaire quand il s'agit de personnes perturbées, que ce soient des adultes ou des enfants.
S'agissant de ces derniers, cela montre, une fois encore, à quel point les propositions de modification de la loi en faveur d'une "présomption de crédibilité des enfants" sont aberrantes. Il n'existe pas d'enfant parfait à la parole infaillible, sauf dans l'idéal imaginaire. A tous âge les êtres humains peuvent être autant sérieux et fiables que perturbés et affabulateurs.
La réforme du code de procédure pénale ayant rendu obligatoire à compter de 2012 la motivation des décisions des cours d'assises est une excellente chose. On ne peut pas se contenter, dans le domaine de la révision, de regretter une décision de condamnation. Il faut, à chaque fois, pouvoir étudier la motivation de la décision annulée pour tenter de comprendre quelle logique a été suivie dans un dossier controversé.
L'existence de révisions ne doit pas leurrer. Dans des dossiers de plus en plus nombreux, et grâce aux progrès de la police technique, les condamnations reposent sur des éléments solides et indiscutables. De ce fait, on constate au fil des années que la part des accusés contestant les faits se réduit peu à peu.
Bien sûr, comme après l'affaire d'Outreau, certains de ceux qui ont commis un crime tenteront de s'appuyer sur les récentes révisions pour tenter de faire croire que pour eux aussi l'erreur judiciaire est annoncée, ou, après condamnation, a été commise.
Mais si des crimes sont commis, c'est qu'il y a parfois aussi des criminels pour les commettre.
Enfin, rappelons une nouvelle fois que le fait même qu'une condamnation définitive puisse être annulée alors que la sanction (actuellement l'emprisonnement) a été mise à exécution, empêche définitivement d'admettre la peine de mort.
Dire à un condamné qu'il a fait de la prison pour rien est délicat.
Aller déposer l'arrêt de révision sur la tombe d'un condamné à mort exécuté à tort pourrait l'être encore plus....