Les premières questions de constitutionnalité (QPC)
Par Michel Huyette
texte mis à jour le 2 mars 2010 à 20 h 15
Dès l'entrée en vigueur - au 1er mars 2010 - de la nouvelle loi offrant à tout justiciable le droit de soulever une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) (voir ici), des avocats se sont emparés de cette nouvelle arme.
Et sans surprise, le sujet concerne... l'actuel régime juridique de la garde à vue, à propos duquel le débat a été lancé il y a quelques semaines quant à sa conformité aux prescriptions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme telle qu'interprétée par la cour européenne des droits de l'homme (voir ici, et ici, et encore ici).
Je rappelle très brièvement que le débat en cours concerne essentiellement la compatibilité entre le droit très réduit à la présence d'un avocat auprès du gardé à vue (30 mns de renconre avec le client, pour chaque période de 24 heures, sans que l'avocat connaisse quoi que ce soit des investigations en cours), et les indications de la CEDH qui mentionne une "vaste gamme d'interventions qui sont propres au conseil", interventions concernant "la discussion de l'affaire, l'organisation de la défense" mais également "la préparation des interrogatoires".
Les avocats ont déjà plaidé devant de nombreuses juridictions l'irrugularité de gardes à vue, et ont reçu des réponses variées des magistrats. La cour de cassation devra se prononcer dans quelques mois.
Mais si les juges français sont compétents pour vérifier si notre législation est conforme aux normes européennes, il leur est interdit de se prononcer sur la conformité entre les lois et la Constitution française. C'est toute l'utilité de la QPC qui permet d'interroger le Conseil Constitutionnel quand bien même une loi n'a pas été soumise à son contrôle au moment où elle a été votée.
Utilisant la QPC, et conformément à la nouvelle procédure en vigueur, des avocats ont demandé aux juges devant lesquels étaient convoqués certains de leurs client de transmettre à la cour de cassation une question interrogeant sur la conformité des règles françaises de la garde à vue avec certaines dispositions de notre Constitution : principe des droits de la défense, droit à une procédure juste et équitable, protection de la liberté individuelle, de la la liberté d'aller et venir, droit de ne pas faire l'objet d'arrestations d'une rigueur non nécessaire, principe d'égalité.
Il faut donc d'abord attendre la position de la cour de cassation, qui décidera de transmettre - ou non - la question posée au Conseil Constitutionnel (1). Elle devra d'abord vérifier que le Conseil n'a jamais validé les dispositions en vigueur, ensuite que la question posée est suffisamment sérieuse ce qui paraît peu douteux.
Le Conseil Constitutionnel devra ensuite prendre position.
Ce sera l'un des premiers tests de sa nouvelle composition, étant relevé que les "politiques" sont aujourd'hui nettement majoritaires par rapport aux spécialistes du droit (en est toutefois membre un ancien premier président de la cour de cassation).
A suivre donc.....
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Mise à jour : Selon le journal Le Monde de ce soir, les avocats de Yvan Colonna ont également déposé une question prioritaire de constitutionnalité, en soulevant plusieurs difficultés : l'absence de motivation des décisions de la cour d'assises (lire ici et ici), le système de vote en délibéré de la cour d'assises spéciale (majorité non qualifiée), le déroulement d'une audience en l'absence de l'accusé et de ses avocats.
La cour de cassation va donc devoir traiter ces questions avant de statuer sur le fond du pourvoi de Monsieur Colonna.
1. Les questions de constitutionnalité soumises à la cour de cassation sont mentionnées sur son site.
texte mis à jour le 2 mars 2010 à 20 h 15
Dès l'entrée en vigueur - au 1er mars 2010 - de la nouvelle loi offrant à tout justiciable le droit de soulever une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) (voir ici), des avocats se sont emparés de cette nouvelle arme.
Et sans surprise, le sujet concerne... l'actuel régime juridique de la garde à vue, à propos duquel le débat a été lancé il y a quelques semaines quant à sa conformité aux prescriptions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme telle qu'interprétée par la cour européenne des droits de l'homme (voir ici, et ici, et encore ici).
Je rappelle très brièvement que le débat en cours concerne essentiellement la compatibilité entre le droit très réduit à la présence d'un avocat auprès du gardé à vue (30 mns de renconre avec le client, pour chaque période de 24 heures, sans que l'avocat connaisse quoi que ce soit des investigations en cours), et les indications de la CEDH qui mentionne une "vaste gamme d'interventions qui sont propres au conseil", interventions concernant "la discussion de l'affaire, l'organisation de la défense" mais également "la préparation des interrogatoires".
Les avocats ont déjà plaidé devant de nombreuses juridictions l'irrugularité de gardes à vue, et ont reçu des réponses variées des magistrats. La cour de cassation devra se prononcer dans quelques mois.
Mais si les juges français sont compétents pour vérifier si notre législation est conforme aux normes européennes, il leur est interdit de se prononcer sur la conformité entre les lois et la Constitution française. C'est toute l'utilité de la QPC qui permet d'interroger le Conseil Constitutionnel quand bien même une loi n'a pas été soumise à son contrôle au moment où elle a été votée.
Utilisant la QPC, et conformément à la nouvelle procédure en vigueur, des avocats ont demandé aux juges devant lesquels étaient convoqués certains de leurs client de transmettre à la cour de cassation une question interrogeant sur la conformité des règles françaises de la garde à vue avec certaines dispositions de notre Constitution : principe des droits de la défense, droit à une procédure juste et équitable, protection de la liberté individuelle, de la la liberté d'aller et venir, droit de ne pas faire l'objet d'arrestations d'une rigueur non nécessaire, principe d'égalité.
Il faut donc d'abord attendre la position de la cour de cassation, qui décidera de transmettre - ou non - la question posée au Conseil Constitutionnel (1). Elle devra d'abord vérifier que le Conseil n'a jamais validé les dispositions en vigueur, ensuite que la question posée est suffisamment sérieuse ce qui paraît peu douteux.
Le Conseil Constitutionnel devra ensuite prendre position.
Ce sera l'un des premiers tests de sa nouvelle composition, étant relevé que les "politiques" sont aujourd'hui nettement majoritaires par rapport aux spécialistes du droit (en est toutefois membre un ancien premier président de la cour de cassation).
A suivre donc.....
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Mise à jour : Selon le journal Le Monde de ce soir, les avocats de Yvan Colonna ont également déposé une question prioritaire de constitutionnalité, en soulevant plusieurs difficultés : l'absence de motivation des décisions de la cour d'assises (lire ici et ici), le système de vote en délibéré de la cour d'assises spéciale (majorité non qualifiée), le déroulement d'une audience en l'absence de l'accusé et de ses avocats.
La cour de cassation va donc devoir traiter ces questions avant de statuer sur le fond du pourvoi de Monsieur Colonna.
1. Les questions de constitutionnalité soumises à la cour de cassation sont mentionnées sur son site.