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Publié par Parolesdejuges

Par Michel Huyette


  La question du régime juridique de la garde à vue a déjà été abordée dans plusieurs articles de ce blog. Je renvoie à ces documents et rappelle qu'il s'agit de savoir dans quelle mesure nos règles françaises sont susceptibles de violer un droit garanti par la convention européenne des droits de l'homme telle qu'elle est interprétée par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).


  La CEDH vient de rendre un nouvel arrêt, en date du 2 mars 2010 (concerne des poursuites  pénales contre un mineur, devant un "juge aux affaires familiales", en Pologne), dans lequel, tout en abordant d'autres problématiques, elle rappelle et semble préciser sa jurisprudence concernant la garde à vue.

  Il y est en effet écrit :

  "La Cour rappelle que le droit de tout accusé à être effectivement défendu par un avocat, au besoin commis d'office, figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable. (..)
 
  La Cour souligne l'importance du stade de l'enquête pour la préparation du procès, dans la mesure où les preuves obtenues durant cette phase déterminent le cadre dans lequel l'infraction imputée sera examinée au procès. Parallèlement, un accusé se trouve souvent dans une situation particulièrement vulnérable à ce stade de la procédure, effet qui se trouve amplifié par le fait que la législation en matière de procédure pénale tend à devenir de plus en plus complexe, notamment en ce qui concerne les règles régissant la collecte et l'utilisation des preuves. (..)

L'équité d'une procédure pénale requiert d'une manière générale, aux fins de l'article 6 de la Convention, que le suspect jouisse de la possibilité de se faire assister par un avocat dès le moment de son placement en garde à vue ou en détention provisoire. Ainsi, un accusé doit, dès qu'il est privé de liberté, pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat et cela indépendamment des interrogatoires qu'il subit. En effet, l'équité de la procédure requiert que l'accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d'interventions qui sont propres au conseil. A cet égard, la discussion de l'affaire, l'organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l'accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l'accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l'avocat doit librement exercer. (..)


La Cour relève plus particulièrement que le premier interrogatoire du requérant par la police au moment de son arrestation, au cours duquel il avait avoué être l'auteur des faits, tout comme ses deux auditions subséquentes par le juge aux affaires familiales, ont été conduits sans que le requérant ait pu s'entretenir au préalable avec son avocat. Ainsi, les autorités sont entrées en possession de ses aveux incriminants et de sa description détaillée des faits du jour critique avant même que le requérant, censé bénéficier de la présomption d'innocence, ait pu être informé de son droit de garder le silence et de ne pas contribuer à sa propre incrimination. La Cour observe en effet qu'en l'espèce, il n'apparaît pas que les autorités aient elles-mêmes, avant de l'interroger, informé d'une manière quelconque le requérant de son droit de garder le silence et de consulter un avocat avant toute déclaration (..).

 


Au vu de ce qui précède, il ne peut prêter à controverse que le requérant a été touché par les restrictions mises à la possibilité pour lui d'avoir accès à son avocat, puisque les éléments ayant servi à fonder sa condamnation avaient été recueillis en l'absence de son défenseur. Compte tenu de la jurisprudence Salduz, cette circonstance suffit à la Cour pour constater que le procès du requérant n'a pas été équitable. Dès lors, il y a eu violation de l'article 6 § 3 c) combiné avec l'article 6 § 1 de la Convention."

 


Ces éléments semblent conforter la position de ceux qui considèrent que notre législation, qui limite la rencontre entre le gardé à vue et un avocat à 30 minutes au cours de chaque période de 24 heures (la garde à vue peut durer 48 heures pour les infractions ordinaires, plus pour quelques infractions graves), et sans que l'avocat puisse connaître quoi que ce soit sur les investigations des enquêteurs et sans qu'il puisse préparer son client à un interrogatoire, n'est pas suffisamment conforme au droit européen.


 

A suivre....






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M
<br /> Je n'ai pas la même vision que vous. Cet arrêt est caricatural : un mineur de 15 ans est interpellé mais on apprend qu'il n'est entendu d'abord que comme témoin.<br /> <br /> En France ça ne se serait pas passé comme ça : soit il est témoin, et donc convoqué et entendu librement. Soit il est suspect, donc interpellé, placé en garde à vue, ses droits notifiés, son avocat<br /> rencontré, puis la première audition effectuée. (même si la législation française n'impose pas d'attendre l'avocat avant de commencer l'audition). En tout état de cause, le simple témoin ne peut<br /> pas être interpellé et partant placé en garde à vue.<br /> <br /> Maintenant je suis d'accord sur un point avec vous. Notre législation n'est pas conforme avec la jurisprudence europénne en ce que cette dernière impose que l'avocat puisse "rechercher des preuves<br /> favorables au suspect". Chez nous les avocats ne sont pas des enquêteurs publics ou privés et ils ont l'obligation (purement théorique sauf rarissimes exceptions) de ne pas faire état devant<br /> quiconque de la garde à vue de leur client : ça n'aide pas à rechercher les preuves de l'innocence du dit client.<br /> <br /> <br />
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P
<br /> Je n'ai retenu de cet arrêt, dans le cadre de cet article, que les phrases relatives à la garde à vue.<br /> Comme elles sont énoncées sous forme de principe général, leur portée va bien au delà de cet arrêt concernant une procédure contre les mineurs en Pologne.<br /> MH<br /> <br /> <br />