Une nouvelle loi contre les "violences de groupe"
Par Michel Huyette
Au journal officiel du 3 mars 2010 est publiée la loi n° 2010-201 renforçant la lutte contre les violences de groupe et la protection des personnes chargées d'une mission de service public.
Je ne m'attarderai que sur les dispositions relatives aux groupes dangereux (1).
Le code pénal comprend dorénavant un nouvel article 222-14-2 ainsi rédigé :
"Le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende".
Selon les travaux parlementaires, cette "infraction–obstacle" permet l’incrimination, "en tant qu’infractions autonomes, des comportements qui sont des actes préparatoires à la commission d’infractions plus graves et qu’il n’est pas possible de réprimer au titre de la tentative, laquelle suppose un commencement d’exécution."
En clair, le groupe doit avoir le projet d'agresser ou de dégrader, mais sans avoir commencé l'opération en quoi que ce soit.
Dès qu'une nouvelle incrimination est créée, le juriste l'examine afin d'apprécier s'il sera aisé de la mettre en oeuvre. Et la difficulté risque ici d'être réelle.
Pour que des poursuites puissent être engagées sur le fondement du nouvel article 222-14-2, il faudra sans doute que le ministère public démontre :
- Qu'il existe bien un "groupement". La question va donc d'abord se poser du nombre minimal de personnes réunies pour que soit caractérisé un tel "groupe".
L'académie française donne la définition suivante du mot groupe : "ensemble formé par un certain nombre de personnes réunies en un même endroit". Voilà qui nous aide bien...
Secondairement, la question se posera de savoir si, pour que l'infraction soit constituée, il est nécessaire que les membres du groupe soient réunis - et donc arrêtés - en un même lieu, où si l'existence du groupe pourra être retenue même quand ses supposés membres sont dispersés.
- Que les membres du groupe préparent des agressions ou des dégradations.
Pour reprendre le terme qui figure dans la proposition de loi, c'est le "but" du groupe qui devra être analysé, c'est à dire ce que les membres du groupe ont en tête quand ils se sont rencontrés.
Mais si des membres du groupe ont en main des armes ou des objets dangereux, il faudra prouver que leur intention n'était pas seulement de les montrer, de les échanger ou les vendre, mais de les utiliser dans un proche avenir dans l'objectif de violenter ou de dégrader.
Cette intention devra selon le texte découler de "faits matériels". Mais lesquels démontreront non seulement un potentiel de violence mais la volonté incontestable de passer à l'acte ?
- Que la participation au groupe est consciente.
Il est souligné dans la proposition de loi qu'il : "faut appartenir à ce groupement en connaissance de cause. Le fait de se retrouver inopinément à proximité de ce groupement n’est donc pas non plus punissable."
Il sera dès lors indispensable de faire la différence entre les membres du groupe se trouvant là pour préparer agression ou dégradation, et les personnes présentes qui ne se sont jointes aux autres que pour savoir de quoi elles parlaient ou pour être avec un ami.
Les difficultés à venir semblent nombreuses. Souhaitons bonne chance aux enquêteurs et aux membres du ministère public au moment de caractériser tous les éléments constitutifs de cette nouvelle infraction annoncée à grand bruit dans les medias....
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1. La loi crée la circonstance aggravante, pour plusieurs délits, de dissimulation de visage afin de ne pas être identifié (art.6 de la loi).
Je ne m'attarderai que sur les dispositions relatives aux groupes dangereux (1).
Le code pénal comprend dorénavant un nouvel article 222-14-2 ainsi rédigé :
"Le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende".
Selon les travaux parlementaires, cette "infraction–obstacle" permet l’incrimination, "en tant qu’infractions autonomes, des comportements qui sont des actes préparatoires à la commission d’infractions plus graves et qu’il n’est pas possible de réprimer au titre de la tentative, laquelle suppose un commencement d’exécution."
En clair, le groupe doit avoir le projet d'agresser ou de dégrader, mais sans avoir commencé l'opération en quoi que ce soit.
Dès qu'une nouvelle incrimination est créée, le juriste l'examine afin d'apprécier s'il sera aisé de la mettre en oeuvre. Et la difficulté risque ici d'être réelle.
Pour que des poursuites puissent être engagées sur le fondement du nouvel article 222-14-2, il faudra sans doute que le ministère public démontre :
- Qu'il existe bien un "groupement". La question va donc d'abord se poser du nombre minimal de personnes réunies pour que soit caractérisé un tel "groupe".
L'académie française donne la définition suivante du mot groupe : "ensemble formé par un certain nombre de personnes réunies en un même endroit". Voilà qui nous aide bien...
Secondairement, la question se posera de savoir si, pour que l'infraction soit constituée, il est nécessaire que les membres du groupe soient réunis - et donc arrêtés - en un même lieu, où si l'existence du groupe pourra être retenue même quand ses supposés membres sont dispersés.
- Que les membres du groupe préparent des agressions ou des dégradations.
Pour reprendre le terme qui figure dans la proposition de loi, c'est le "but" du groupe qui devra être analysé, c'est à dire ce que les membres du groupe ont en tête quand ils se sont rencontrés.
Mais si des membres du groupe ont en main des armes ou des objets dangereux, il faudra prouver que leur intention n'était pas seulement de les montrer, de les échanger ou les vendre, mais de les utiliser dans un proche avenir dans l'objectif de violenter ou de dégrader.
Cette intention devra selon le texte découler de "faits matériels". Mais lesquels démontreront non seulement un potentiel de violence mais la volonté incontestable de passer à l'acte ?
- Que la participation au groupe est consciente.
Il est souligné dans la proposition de loi qu'il : "faut appartenir à ce groupement en connaissance de cause. Le fait de se retrouver inopinément à proximité de ce groupement n’est donc pas non plus punissable."
Il sera dès lors indispensable de faire la différence entre les membres du groupe se trouvant là pour préparer agression ou dégradation, et les personnes présentes qui ne se sont jointes aux autres que pour savoir de quoi elles parlaient ou pour être avec un ami.
Les difficultés à venir semblent nombreuses. Souhaitons bonne chance aux enquêteurs et aux membres du ministère public au moment de caractériser tous les éléments constitutifs de cette nouvelle infraction annoncée à grand bruit dans les medias....
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1. La loi crée la circonstance aggravante, pour plusieurs délits, de dissimulation de visage afin de ne pas être identifié (art.6 de la loi).