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Publié par Michel Huyette

Par Michel Huyette



   Discuter avec des justiciables qui ont été partie à un procès est toujours une occasion très intéressante de découvrir comment ils perçoivent le processus auquel ils ont participé.

  Ces justiciables s'interrogent fréquemment sur le comportement de leur avocat à l'audience, et notamment sur la durée de son intervention. La question posée est du genre "a-t-il parlé suffisamment longtemps et assez bien plaidé ?"

  Il semble que nos concitoyens ignorent vraiment comment un dossier est traité, comment les juges travaillent, et quelle est l'utilité de l'audience. Voici donc quelques explications concrètes.

  En matière civile (la matière pénale sera abordée une autre fois), avant l'audience, les parties se transmettent leurs conclusions (leur avis écrit et leurs arguments) ainsi que les documents qu'elles veulent discuter et remettre au juge. Et à l'audience les avocats remettent des dossiers parfois volumineux contenant un ensemble de documents que les juges vont examiner pendant le délibéré, avant de rendre leur décision.

  A l'audience, les avocats dont par définition les thèses s'opposent, vont le premier nous dire que la solution c'est "blanc", et l'autre rétorquer ensuite qu'évidemment non, la solution c'est "noir". Cela n'apporte pas grand chose au débat ! En plus, même si l'un des avocats avance un argument qui semble plausible, il ne sera pris en compte que si tous les justificatifs nécessaires sont dans le dossier. Affirmer c'est une chose, mais dans un procès ce qu'il faut par dessus tout c'est prouver que ce que l'on avance est parfaitement exact, ce qui n'est pas tout à fait pareil.

  Pour ces raisons, les plaidoiries à l'audience n'ont qu'une utilité réduite. Elles permettent seulement d'avoir une prémière idée de la nature du litige, et de repérer les arguments qui peuvent assez rapidement être écartés comme non convaincants ou juridiquement manifestement erronés.

  Il faut savoir aussi qu'une fois l'audience terminée, les juges ne plongent pas tout de suite dans les dossiers avec lesquels ils repartent. Certains seront étudiés le lendemain, d'autres une semaine ou un mois plus tard, en fonction de la charge des magistrats et des dossiers déjà en attente de traitement sur leurs étagères. Dès lors, le juge qui ouvre un dossier plusieurs jours ou semaines après l'audience ne se souvient plus du tout de ce qui a été plaidé. Et comme ce qui compte c'est exclusivement ce qu'il y a dans le dossier remis, les juges prennent très peu de notes à l'audience. Au moment de rédiger leur arrêt, ils se reportent aux conclusions écrites des avocats, et non à leurs notes de l'audience, qui au demeurant pourraient comporter des erreurs.

  Finalement, dans le travail quotidien des juges, l'audience civile ne présente pas un grand intérêt en elle-même. C'est pourquoi, comme les magistrats sont nombreux à le souhaiter et comme certains le disent aux avocats, quelques brèves observations de leur part, et uniquement pour mettre en avant les éléments essentiels du dossier, sont amplement suffisantes.

  Oui mais voilà, il y a parfois le justiciable/client dans le fond de la salle. Et régulièrement des avocats s'approchent de nous au début de l'audience et nous murmurent à l'oreille "mon client est là, je plaide corps présent.." ce qui signifie : "comme mon client est là, je vais être obligé(e) de plaider plus longtemps que nécessaire".

  Cela appelle les observations suivantes :

  D'abord, la présence du "client" ne change rien à ce qui a été dit plus haut sur l'intérêt inexistant de longues plaidoiries. L'avocat ne doit faire que ce qui est utile pour le traitement du dossier, et dans cette optique plaider plus longtemps ne sert à rien du tout.

  Ensuite, on ne peut que s'interroger sur ce que l'avocat dit à son client avant l'audience. Soit il fait confiance à son intelligence et il lui explique lui-même qu'à l'audience il ne fera que quelques observations car parler plus est inutlie et n'apportera rien, ce que nos concitoyens comprennent parfaitement quand on leur explique comment se traite un dossier judiciaire. Soit ils font croire à leurs client qu'ils seront plus efficaces s'ils parlent longtemps, ou veulent donner l'impression d'en "faire plus", peut-être en lien avec le montant des honoraires réclamé. Mais alors, cela signifie qu'il y a une part d'inexactitude (de mensonge ?) dans ce qui est expliqué par l'avocat à son client sur la raison d'être et l'utilité d'une audience. Et cela est toujours troublant.

  En tous cas, les justiciables doivent être convaincus d'une chose : l'avocat qui s'exprime le plus longtemps à l'audience ne fait pas un meilleur travail, et il n'aura pas plus souvent gain de cause que les autres.


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C
 Un avocat efficace est celui qui palaide "utile" et sait que, au bout de 10 minutes l'attention, pour le moins, s'émousse. Il est vrai que les magistrats ont, plus que d'autres, l'habitude d'écouter parler, mais ils ont l'obligation aussi de le faire souvent et sur de longues périodes. Quand la saturation est atteinte, la meilleure volonté du monde n'y peut rien. Donc plaider bref et clair est une qualité majeure pour un avocat. Mais demande un gros travail de préparation que les avocat ne veulent ou ne peuvent pas faire. Je leur suggérerais de, de temps en temps, s'installer dans une salle d'audience en début et de n'en repartir qu'à la fin.....
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