Le juge, la presse, et le café du commerce
Par Michel Huyette
La presse nous annonce ces jours-ci la remise en liberté d'une femme, emprisonnée pendant plusieurs mois au Canada, pour avoir enlevé de force et conduit en France avec elle les enfants conçus avec un canadien.
Pendant une longue période les medias ont décrit cette histoire peu ordinaire, et nous avons pu voir à la télévision ou entendre sur les radios les témoignages de la famille et des proches de cette femme, qui tous ont dénoncé avec vigueur son incarcération, et affirmé à qui voulait l'entendre qu'elle n'avait fait que protéger ses enfants contre un père dangereux. Dangereux pourquoi ? Parce que, selon la phrase reprise à l'identique par tous les medias, "il appartient à un mouvement qualifié secte en France". Et bien des citoyens ordinaires, interrogés lors de micros-trottoirs, ont émis des avis sévères sur les décisions de justice.
Pourtant, vous aurez sans doute remarqué que jamais personne en France ne semble avoir enquêté sur ce qu'est réellement et concrètement ce mouvement auquel appartiendrait le père, et qu'il ne nous a jamais été précisé en quoi, à la supposer exacte, l'appartenance de celui-ci à ce mouvement pourrait mettre les enfants en danger. Nous ignorons tout de lui.
Il ne s'agit pas ici de prendre parti sur la capacité de ce père d'élever correctement ses enfants car nous n'en savons rien.
Ce qui est intéressant à observer, mais aussi plutôt inquiétant, c'est que de très nombreuses personnes ont cru pouvoir émettre un avis, notamment pour contester avec virulence le choix des juges qui ont successivement statué sur la garde des enfants, en France et au Canada, sans avoir la moindre idée de ce qui se passait réellement dans cette famille et sans rien savoir de ce mouvement qualifié secte en France.
Mais ce n'est pas la première fois que la justice se rend au café du commerce. Et ce ne sera pas la dernière...