L'insalubrité du dépôt du palais de justice de Paris. Pourquoi est-ce important ?
Par Michel Huyette
Depuis maintenant des années, des avocats, des magistrats, et des organisations françaises et internationales, dénoncent l'état d'insalubrité du dépôt du palais de justice de Paris. Il s'agit de l'endroit où transitent les personnes qui ont été arrêtées ou sont déjà incarcérées, et qui doivent être présentées à un magistrat ou comparaître devant une juridiction. L'attente peut aller jusqu'à plusieurs heures, voire une journée ou nuit.
Les lieux sont vétustes, et surtout dans un état déplorable.
Un député les ayant visités récemment a déclaré : "Ce qui m'a frappé, ce sont les deux salles d'avant-fouille, qui sont dans un état très vétuste et totalement insalubre. On y "stocke" jusqu'à quarante personnes le soir. Il y a trois bancs pour s'asseoir en travers de la pièce. Il y a un WC à la turque non cloisonné, ce qui fait qu'on doit faire ses besoins devant tout le monde. Et puis ça sent mauvais, c'est épouvantable. Les gens doivent attendre là avant d'être fouillés et mis en cellule. Ça prend un temps considérable parce qu'il manque de personnel. Il faut vingt minutes pour exécuter une fouille corporelle. Quand il y en a trente ou quarante...". Il a ajouté :"Ensuite, il y a deux types de cellules, celles qui ont été rénovées et qui sont acceptables, à la limite. Et puis, il y a celles qui ne l'ont pas été. Elles ont un trou comme WC avec une chasse d'eau à actionner de l'extérieur. Il y a un robinet qui ne marche pas à tous les coups. Il n'y a pas de lit, simplement un matelas ignifugé très dur, qui a été installé depuis quinze jours en prévision de la visite de députés. Jusque-là, les types dormaient à même le béton ! Et sans couverture parce que les gardiens sont terrorisés par le risque de suicide, alors qu'il y a des caméras de surveillance dans chaque cellule. Il arrive qu'on entasse jusqu'à six personnes dans ces cellules sur des couchettes superposées espacées de seulement 40 centimètres." (André Vallini)
Selon France Info : "L’hygiène est le problème n°1 du dépôt, où il fait souvent une chaleur étouffante. Les policiers qui gèrent le lieu n’en peuvent plus. Certains d’entre eux ont déjà attrapé la gale. Il y a même eu des dépistages de tuberculose."
Le journal du dimanche ajoute : "Les 60 cellules, où attendent parfois une journée entière les suspects écroués présentés aux magistrats pour interrogatoire ou audience, font trois mètres carré, y compris l'urinoir, alors que trois personnes y prennent place systématiquement. Dépourvues de fenêtres, les cellules de la "souricière" ont un banc trop étroit pour que les trois occupants s'y assoient tous en même temps. Les murs, le sol et le plafond sont couverts d'excréments et les odeurs sont difficilement supportables.".
Le constat est unanime. Les conditions dans lesquelles des personnes sont retenues dans ce lieux sont totalement indignes.
Mais il ne faudrait surtout pas s'arrêter à un constat matériel. Car la problématique fondamentale est autre.
Comme l'exige la convention européenne des droits de l'homme dans son article 6, tout individu a droit à un procès équitable. Et pour qu'un procès soit équitable, encore faut-il que celui qui comparaît devant son juge soit physiquement, intellectuellement et moralement en pleine possession de ses moyens. Autrement dit qu'il n'y ait pas d'état d'infériorité manifeste.
J'ai récemment parlé des procès qui durent trop tard dans la nuit, pratique qui a entraîné la condamnation de l'Etat français tant au niveau international que national (cf. cet article). S'agissant du dépôt du palais de justice de Paris, il s'agit de la même chose. Une personne qui a passé des heures dans des locaux exigus, sales, avilissants, et qui en a été inéluctablement atteinte physiquement et moralement n'est plus (ou au moins risque fortement de ne plus être) en état de se présenter sereine et forte devant le juge.
En plus, la fatigue de celui qui comparaît, parce qu'elle est susceptible de réduire sa capacité d'expression et de contestation des charges qui pèsent sur lui, risque fortement de modifier l'analyse de l'affaire par les juges, et donc d'entraîner des erreurs d'appréciation. Sans parler de l'impact, que l'on oublie trop, de l'apparence physique de celui qui s'exprime sur l'image qu'il donne à celui qui l'écoute.
Le caractère équitable du procès est donc nécessairement atteint.
Cela explique pourquoi, récemment, des magistrats de juridictions correctionnelles ont annulé des procédures concernant des personnes ayant séjourné dans ce dépôt avant de comparaître devant elles.
La marge de débat autour de cette question est particulièrement réduite. Jusqu'à ce jour aucune voix ne n'est élevée pour affirmer acceptable l'état de ce dépôt.
C'est ce qui rend incompréhensible l'attitude des gouvernants au cours des années écoulées.
En effet la situation est connue de tous, en premier lieu du ministère de la justice et du ministère de l'intérieur, depuis très lontemps. Pourtant, seules quelques améliorations ont été apportées au lieu, mais qui ne changent en rien le constat effrayant effectué une nouvelle fois ces deniers jours.
Or ce n'est qu'une fois connues et médiatisées les décisions des juridictions parisiennes qui ont annulé des procédures que le ministère de la justice a annoncé le déblocage de fonds pour des travaux de réfection.
Il reste à expliquer pourquoi l'indifférence a prévalu pendant tant d'années.
Les lieux sont vétustes, et surtout dans un état déplorable.
Un député les ayant visités récemment a déclaré : "Ce qui m'a frappé, ce sont les deux salles d'avant-fouille, qui sont dans un état très vétuste et totalement insalubre. On y "stocke" jusqu'à quarante personnes le soir. Il y a trois bancs pour s'asseoir en travers de la pièce. Il y a un WC à la turque non cloisonné, ce qui fait qu'on doit faire ses besoins devant tout le monde. Et puis ça sent mauvais, c'est épouvantable. Les gens doivent attendre là avant d'être fouillés et mis en cellule. Ça prend un temps considérable parce qu'il manque de personnel. Il faut vingt minutes pour exécuter une fouille corporelle. Quand il y en a trente ou quarante...". Il a ajouté :"Ensuite, il y a deux types de cellules, celles qui ont été rénovées et qui sont acceptables, à la limite. Et puis, il y a celles qui ne l'ont pas été. Elles ont un trou comme WC avec une chasse d'eau à actionner de l'extérieur. Il y a un robinet qui ne marche pas à tous les coups. Il n'y a pas de lit, simplement un matelas ignifugé très dur, qui a été installé depuis quinze jours en prévision de la visite de députés. Jusque-là, les types dormaient à même le béton ! Et sans couverture parce que les gardiens sont terrorisés par le risque de suicide, alors qu'il y a des caméras de surveillance dans chaque cellule. Il arrive qu'on entasse jusqu'à six personnes dans ces cellules sur des couchettes superposées espacées de seulement 40 centimètres." (André Vallini)
Selon France Info : "L’hygiène est le problème n°1 du dépôt, où il fait souvent une chaleur étouffante. Les policiers qui gèrent le lieu n’en peuvent plus. Certains d’entre eux ont déjà attrapé la gale. Il y a même eu des dépistages de tuberculose."
Le journal du dimanche ajoute : "Les 60 cellules, où attendent parfois une journée entière les suspects écroués présentés aux magistrats pour interrogatoire ou audience, font trois mètres carré, y compris l'urinoir, alors que trois personnes y prennent place systématiquement. Dépourvues de fenêtres, les cellules de la "souricière" ont un banc trop étroit pour que les trois occupants s'y assoient tous en même temps. Les murs, le sol et le plafond sont couverts d'excréments et les odeurs sont difficilement supportables.".
Le constat est unanime. Les conditions dans lesquelles des personnes sont retenues dans ce lieux sont totalement indignes.
Mais il ne faudrait surtout pas s'arrêter à un constat matériel. Car la problématique fondamentale est autre.
Comme l'exige la convention européenne des droits de l'homme dans son article 6, tout individu a droit à un procès équitable. Et pour qu'un procès soit équitable, encore faut-il que celui qui comparaît devant son juge soit physiquement, intellectuellement et moralement en pleine possession de ses moyens. Autrement dit qu'il n'y ait pas d'état d'infériorité manifeste.
J'ai récemment parlé des procès qui durent trop tard dans la nuit, pratique qui a entraîné la condamnation de l'Etat français tant au niveau international que national (cf. cet article). S'agissant du dépôt du palais de justice de Paris, il s'agit de la même chose. Une personne qui a passé des heures dans des locaux exigus, sales, avilissants, et qui en a été inéluctablement atteinte physiquement et moralement n'est plus (ou au moins risque fortement de ne plus être) en état de se présenter sereine et forte devant le juge.
En plus, la fatigue de celui qui comparaît, parce qu'elle est susceptible de réduire sa capacité d'expression et de contestation des charges qui pèsent sur lui, risque fortement de modifier l'analyse de l'affaire par les juges, et donc d'entraîner des erreurs d'appréciation. Sans parler de l'impact, que l'on oublie trop, de l'apparence physique de celui qui s'exprime sur l'image qu'il donne à celui qui l'écoute.
Le caractère équitable du procès est donc nécessairement atteint.
Cela explique pourquoi, récemment, des magistrats de juridictions correctionnelles ont annulé des procédures concernant des personnes ayant séjourné dans ce dépôt avant de comparaître devant elles.
La marge de débat autour de cette question est particulièrement réduite. Jusqu'à ce jour aucune voix ne n'est élevée pour affirmer acceptable l'état de ce dépôt.
C'est ce qui rend incompréhensible l'attitude des gouvernants au cours des années écoulées.
En effet la situation est connue de tous, en premier lieu du ministère de la justice et du ministère de l'intérieur, depuis très lontemps. Pourtant, seules quelques améliorations ont été apportées au lieu, mais qui ne changent en rien le constat effrayant effectué une nouvelle fois ces deniers jours.
Or ce n'est qu'une fois connues et médiatisées les décisions des juridictions parisiennes qui ont annulé des procédures que le ministère de la justice a annoncé le déblocage de fonds pour des travaux de réfection.
Il reste à expliquer pourquoi l'indifférence a prévalu pendant tant d'années.