F. Burgaud devant le CSM (2)
Par Michel Huyette
Les medias nous permettent de suivre presque en direct ce qui se passe devant le CSM qui cette semaine entend F. Burgaud et doit dire s'il y a eu des défaillances dans sa gestion du dossier dit de Outreau.
Comme je l'ai indiqué dans le précédent article, l'une des questions qui se pose est de savoir jusqu'à quel niveau les pratiques des magistrats peuvent légitimement être décortiquées et les éventuels manquements ou fautes recherchés.
Que lit-on dans une dépêche de l'AFP du milieu de la matinée ? Que la directrice des services judiciaires (le service qui au Ministère de la justice gère notamment les carrières des magistrats) a mis en cause la façon dont F. Burgaud a posé certaines questions qui auraient été fermées (une question est fermée quand la personne n'est pas invitée à développer son avis mais doit répondre par oui ou par non telle « ça s'est bien passé comme ça ? », alors qu'elle est ouverte en ces termes « comment cela s'est-il passé ? »). Et l'AFP cite une question posée par le magistrat à un enfant « c'est bien ton papa qui a fait ça ? »
Mais à supposer que demain on décortique tous les procès verbaux de tous les interrogatoires de tous les juges d'instruction de France, on n'en trouvera pas un seul qui ne contient aucune question fermée. Par ailleurs, la dépêche ne nous dit pas quelle est le nombre total des questions posées par F. Burgaud pendant toute la procédure, ce qui pourtant serait utile pour apprécier le nombre et la proportion des questions inappropriées par rapport aux questions formulées de façon adéquates.
Il n'empêche que la façon dont une question est posée n'est pas neutre, et qu'il est maladroit de poser des questions fermées dans ce genre de dossier, d'autant plus à des enfants. Cela met bien en jeu la compétence professionnelle du magistrat qui interroge et la critique doit être admise. Mais pour aller au fond du débat et apprécier plus précisément et donc plus justement la part de responsabilité personnelle de F. Burgaud, il serait intéressant que le CSM entende le directeur de l'école nationale de la magistrature (ENM) afin que celui-ci explique, si tel est bien le cas, à quel(s) moment(s) dans la formation des futurs magistrats la technique de l'interrogatoire est abordée, et plus précisément si un enseignement sur les différentes façons de poser des questions est dispensé. La dépêche de l'AFP ne mentionne pas une affirmation en ce sens de la directrice des services judiciaires.
La directrice a également reproché à F. Burgaud d'avoir été trop influencé par les expertises de crédibilité, en ajoutant selon la dépêche qu'il aurait dû lui-même procéder à l'analyse de la crédibilité des enfants.
Cela nous laisse un peu perplexe. Quand juge désigne un expert psychologue, c'est justement pour disposer d'un autre avis que le sien et ainsi éviter une éventuelle erreur personnelle d'analyse. C'est aussi pour avoir l'avis d'un professionnel moins impliqué, plus distant, donc plus neutre.
Autrement dit, F. Burgaud désigne des experts pour mieux apprécier la crédibilité des enfants et cela est critiqué. Mais s'il ne l'avait pas fait, ne lui aurait-on pas reproché de s'être attribué une compétence qu'il n'a pas et d'avoir voulu faire cavalier seul dans un dossier pourtant très compliqué ?
Ce qui est rapporté de la séance de ce matin fait encore plus espérer du CSM qu'il ne se livre pas à une analyse aussi superficielle des éléments complexes de ce dossier. C'est rappelons le à cette condition que sa décision, de quelque nature qu'elle soit, apparaîtra légitime.
Comme je l'ai indiqué dans le précédent article, l'une des questions qui se pose est de savoir jusqu'à quel niveau les pratiques des magistrats peuvent légitimement être décortiquées et les éventuels manquements ou fautes recherchés.
Que lit-on dans une dépêche de l'AFP du milieu de la matinée ? Que la directrice des services judiciaires (le service qui au Ministère de la justice gère notamment les carrières des magistrats) a mis en cause la façon dont F. Burgaud a posé certaines questions qui auraient été fermées (une question est fermée quand la personne n'est pas invitée à développer son avis mais doit répondre par oui ou par non telle « ça s'est bien passé comme ça ? », alors qu'elle est ouverte en ces termes « comment cela s'est-il passé ? »). Et l'AFP cite une question posée par le magistrat à un enfant « c'est bien ton papa qui a fait ça ? »
Mais à supposer que demain on décortique tous les procès verbaux de tous les interrogatoires de tous les juges d'instruction de France, on n'en trouvera pas un seul qui ne contient aucune question fermée. Par ailleurs, la dépêche ne nous dit pas quelle est le nombre total des questions posées par F. Burgaud pendant toute la procédure, ce qui pourtant serait utile pour apprécier le nombre et la proportion des questions inappropriées par rapport aux questions formulées de façon adéquates.
Il n'empêche que la façon dont une question est posée n'est pas neutre, et qu'il est maladroit de poser des questions fermées dans ce genre de dossier, d'autant plus à des enfants. Cela met bien en jeu la compétence professionnelle du magistrat qui interroge et la critique doit être admise. Mais pour aller au fond du débat et apprécier plus précisément et donc plus justement la part de responsabilité personnelle de F. Burgaud, il serait intéressant que le CSM entende le directeur de l'école nationale de la magistrature (ENM) afin que celui-ci explique, si tel est bien le cas, à quel(s) moment(s) dans la formation des futurs magistrats la technique de l'interrogatoire est abordée, et plus précisément si un enseignement sur les différentes façons de poser des questions est dispensé. La dépêche de l'AFP ne mentionne pas une affirmation en ce sens de la directrice des services judiciaires.
La directrice a également reproché à F. Burgaud d'avoir été trop influencé par les expertises de crédibilité, en ajoutant selon la dépêche qu'il aurait dû lui-même procéder à l'analyse de la crédibilité des enfants.
Cela nous laisse un peu perplexe. Quand juge désigne un expert psychologue, c'est justement pour disposer d'un autre avis que le sien et ainsi éviter une éventuelle erreur personnelle d'analyse. C'est aussi pour avoir l'avis d'un professionnel moins impliqué, plus distant, donc plus neutre.
Autrement dit, F. Burgaud désigne des experts pour mieux apprécier la crédibilité des enfants et cela est critiqué. Mais s'il ne l'avait pas fait, ne lui aurait-on pas reproché de s'être attribué une compétence qu'il n'a pas et d'avoir voulu faire cavalier seul dans un dossier pourtant très compliqué ?
Ce qui est rapporté de la séance de ce matin fait encore plus espérer du CSM qu'il ne se livre pas à une analyse aussi superficielle des éléments complexes de ce dossier. C'est rappelons le à cette condition que sa décision, de quelque nature qu'elle soit, apparaîtra légitime.