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Publié par Michel Huyette

Par Michel Huyette



  Il nous faut bien admettre que dans certaines circonstances les français doivent s'interroger sur le fonctionnement de leur justice.


Voici que les medias racontent l'histoire de cet homme poursuivi pour crime, condamné par une première cour d'assises, qui après son appel est de nouveau condamné par la cour d'assises d'appel, mais qui est remis en liberté quelques mois après parce qu'il manque quelque part la signature d'un greffier.


Que s'est-il passé ?


L'article 378 du code de procédure pénale nous indique que, à la cour d'assises : "Le greffier dresse, à l'effet de constater l'accomplissement des formalités prescrites, un procès-verbal qui est signé par le président et par ledit greffier. Le procès-verbal est dressé et signé dans le délai de trois jours au plus tard du prononcé de l'arrêt."


Le procès verbal est un document écrit dans lequel le greffier, qui a pris des notes heure après heure, mentionne tout ce qui se passe d'important pendant le procès : constitution du jury, lectures obligatoires (décision de renvoi devant la cour d'assises, décisions de première instance en cas d'appel..), nom des témoins qui ne prêtent pas serment parce qu'ils sont de la famille proche de l'accusé, heures de début et de fin des audiences, incidents, décisions prononcées etc.. La lecture de ce document est un moyen, une fois le procès terminé, de s'assurer que toutes les règles essentielles ont été respectées.


Par ailleurs, quand un accusé a été condamné par une cour d'assises d'appel, donc qu'il y a eu déjà deux procès, il peut encore faire un pourvoi en cassation. La Cour de cassation, à Paris, a pour mission de vérifier que toutes les règles encadrant le procès ont bien été respectées. Et pour cela, elle va principalement étudier le contenu du procès verbal.


Dans notre affaire, un greffier n'a pas signé la partie du procès verbal correspondant aux moments du procès auxquels il a assisté (deux greffiers se sont succédé), et il n'a pas signé non plus les décisions rendues pendant cette période. Ce greffier est malheureusement tombé gravement malade dès la fin du procès. Le président de la cour d'assises a indiqué que signe : "le seul président de la cour d'assises (..) suite au congé-maladie du greffier et à son état invalidant ne permettant pas sa signature".


La règle de la double signature de l'article 378 n'a donc pas toujours été respectée. Et la cour de cassation a estimé " qu'en l'état de cette seule mention, insuffisante en l'absence de toute précision notamment sur la date à laquelle Mme X.. est devenue indisponible, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de l'existence d'un événement de force majeure, seul susceptible de conférer, faute de signature du greffier, authenticité aux actes susvisés" (arrêt n°07.81925 du 12 septembre 2007).


Il y aura donc un nouveau procès, devant une troisième cour d'assises.


On apprend quand même à la lecture de la décision de la Cour de cassation que cela aurait peut-être été évité si le président de la cour d'assises avait pensé à préciser à partir de quelle date le greffier est tombé malade. La haute juridiction précise que si tel avait été le cas elle aurait considéré, après avoir vérifié que c'est bien à partir de cette date que manque la signature du greffier, qu'il existait un évènement de force majeure ayant empêché le greffier de signer, et qu'alors la validité du procès verbal n'aurait pas été remise en cause.


Quoi qu'il en soit, les parents des victimes se sont déclaré très choqués, et ont fait part de leur incompréhension quant au fait qu'une personne condamnée deux fois de suite soit remise en liberté parce que manque une signature sur un document.


Au-delà de la position compréhensible de la cour de cassation qui doit veiller au respect des règles de procédure les plus importantes, ce qui est troublant c'est que la décision de la cour d'assises d'appel est annulée alors qu'il n'est constaté, concrètement, aucune atteinte d'aucune sorte aux droits de l'accusé. En effet, ce n'est certainement pas parce que manque la signature d'un greffier sur un document que l'on peut conclure que le procès s'est déroulé de façon anormale. Et l'avocat qui tente d'obtenir l'annulation de la décision défavorable à son client à cause de l'absence d'une signature le sait parfaitement bien.


 

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Z
"Et l'avocat qui tente d'obtenir l'annulation de la décision défavorable à son client à cause de l'absence d'une signature le sait parfaitement bien."En quoi le fait que l'avocat fasse son travail de défenseur des intérêts de son client semble-t-il vous géner?
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P
Je précise le sens de ma phrase. L'avocat qui revendique l'application d'une règle de droit est professionnellement irréprochable. Il agit ainsi pour la défense de son client et rien ne semble être de nature à restreindre sa marge de manoeuvre. Oui mais..  Le seul fait qu'une démarche ait pour finalité la reconnaissance d'un droit impose-t-il de la considérer comme totalement légitime ? C'est aller un peu vite en besogne. Ici, comme je l'ai déjà indiqué, l'avocat qui saisit le prétexte de l'absence d'un signature sur le document final sait que le procès auquel il a assisté s'est tenu de telle façon que tous les droits de son clients ont été respectés. Il sait pour l'avoir constaté lui même que rien dans le déroulement du procès n'aurait pu, en dehors de ce manque de signature, justifier le renvoi du dossier devant une troisième cour d'assises.  On pourrait donc imaginer que l'avocat (et le client) choisissent de ne pas utiliser ce prétexte pour obtenir une cassation qu'ils savent par ailleurs injustifiée. Est-ce rêver ? Sans doute un peu, car l'accusé déjà deux fois condamné cherche naturellement tous les moyens pour "sauver sa tête", et pour l'avocat un troisième procès s'est la certitude de nouveaux honoraires. Alors la morale.....