Jours de crime (Bibliographie)
Dans tous les palais de justice de France les audiences pénales sont publiques. En fonction de la nature des affaires, de leur éventuelle médiatisation, les salles sont plus ou moins remplies. Certains visiteurs sont occasionnels (particuliers, classes et enseignants..), d'autres viennent régulièrement.
Parmi ces derniers se trouvent les "chroniqueurs judiciaires".
C'est le livre de deux d'entre eux qui a été récemment publié par les éditions L'Iconoclaste (leur site), qui est intitulé :
JOURS DE CRIMES
Pascale Robert-Diard, pour le journal Le Monde, et Stéphane Durand-Souffland, pour le journal Le Figaro, fréquentent assidûment les cours d'assises et les tribunaux correctionnels depuis de nombreuses années.
Ils ont voulu, à travers ce livre, partager leurs expériences essentiellement des procès criminels.
Sur le site de l'éditeur, le livre est présenté (cf.ici) de la façon suivante :
"Trahison, mort, passion, drames. Ici tout est vrai. À la barre, l’intimité se dévoile. On se passionne pour ces histoires. Des hommes et des femmes dont on ignore tout nous deviennent familiers. Mais c’est aussi au cœur de nous-mêmes que les auteurs nous entraînent. On se surprend à se confondre avec certains, citoyens presque ordinaires, nos semblables, dont la vie a dérapé. On pleure et on rit, on connaît la colère, le dégoût ou l’empathie. Chaque scène rapportée, chaque récit de ces mille et un morceaux est un moment d’émotion.
Les deux auteurs écrivent en préambule du livre que dans les cours d'assises "on se saoule de mots et de visages, des hommes et des femmes dont nous ignorions tout nous deviennent familiers (..), rien d'eux ne nous est épargné surtout ce qu'ils voudraient cacher, leurs passions, leurs mystères, leurs mensonges, leurs aveux, leurs silences, leurs épreuves, leurs corps, ses blessures et ses plaisirs sont disséqués devant nous. (..) Nous chroniqueurs judiciaires sommes des ripailleurs d'humanité".
Les récits des nombreux procès, qui se suivent le long des quelques 400 pages du livre, sont tour à tour descriptifs, humoristiques, critiques, ou bouleversants. Les deux auteurs rendent parfaitement compte de tout ce qui constitue les affaires criminelles, les faits, les protagonistes et leurs entourages, les professionnels (magistrats, avocats, huissiers, experts). Et même le public.
Les deux auteurs ont eu la bonne idée de ne pas retenir uniquement les procès les plus médiatisés.
Les auteurs ont trouvé des mots très juste pour parler du délibéré non en lui-même mais de l'attente des parties au procès, et des observateurs. Et de l'annonce du verdict, "moment glacial du procès".
C'est avec une touche d'humour qu'ils parlent des avocats qui se retrouvent dans les pages des magazines à la mode. Et écrivent sur ceux-ci : "Le classement GQ constitue en réalité le révélateur des problèmes d'égo qui travaillent bon nombre d'avocats au premier rang desquels les pénalistes. Ils veulent qu'on les aime bien qu'on leur reproche de défendre des criminels. Le génie du marketing qui a inventé le concept d'avocat puissant savait-il qu'il lançait une drogue dure sur un marché de soixante mille robes noires ?"
Mais c'est avec plus de sens critique qu'ils mentionnent les avocats d'associations, "porte-drapeaux d'une cause qui détournent les assises pour en faire une tribune", qui "font la tournée des prétoires pour accabler systématiquement l'accusé et prononcer une plaidoirie", qui "ne connaissent le dossier que de manière très superficielle", et qui "dans les moments de griserie médiatique" "redeviennent des avocats normaux et parlent davantage d'eux-mêmes que de leur client du moment".
Ou font la liste des "ficelles" utilisées plus que de raison par les avocats pénalistes.
Ou, encore, contestent certains mots ou expressions utilisés contre les accusés, y compris par les magistrats du ministère public, qui ont pour conséquence que "les assises sont passées de l'effroi à l’écœurement".
C'est avec plus de sévérité que les auteurs mentionnent dans le public des assises des personnes ayant "l'instinct du lyncheur".
Dans le récit des procès, les auteurs observent, analysent, décortiquent. Et se font leur opinion, justifiée ou non. Il n'empêche que même l'observation répétée des procès d'assises et l'expérience acquise qui en découle ne permettent pas de tout expliquer. Comme cela est écrit très justement : "Il y a dans le procès d'assises un ultime fossé qui interdit de tout comprendre parce qu'on ne porte pas en nous le poids du crime".
Un glossaire des termes fréquemment utilisés en justice a été opportunément ajouté en fin de livre.
Tout ceci en fait un ouvrage particulièrement intéressant et agréable à lire, et destiné à un vaste public.