Communiqué du Conseil Supérieur de la Magistrature (7 mars 2017... et un peu plus tard)
note : Cet article a été mis en ligne en mars 2017. Certains propos entendus ces jours-ci à l'issue d'un procès justifient une nouvelle publication.
Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni le 7 mars 2017, exprime son inquiétude face à certains débats et initiatives qui, à l’occasion d’un temps démocratique majeur, s’en prennent à l’institution judiciaire.
S’attaquer à l’institution judiciaire, c’est miner la démocratie et l’État de droit, qui doit garantir à tous le respect effectif de la légalité. Notre Constitution et le statut des magistrats créent les conditions de l’indépendance des juridictions. Autorité constitutionnelle composée de non magistrats et de magistrats, le Conseil supérieur de la magistrature, en charge du respect de ces conditions et exigences, estime devoir rappeler l’impérieuse nécessité de cet équilibre institutionnel et la force de ces choix.
Les pouvoirs conférés à l’Autorité judiciaire sont étrangers à toute idée de gouvernement des juges. Ils n’ont d’autre finalité que d’assurer la mise en oeuvre effective de l’ensemble des règles par lesquelles la représentation nationale organise la vie en société et promeut le bien commun, ainsi que la garantie des droits et libertés que celle-ci proclame. Ils protègent de l’arbitraire, d’une justice instrumentalisée comme d’une justice bâillonnée. Ces pouvoirs s’exercent selon des règles procédurales de plus en plus protectrices des droits de la personne et sous un strict contrôle juridictionnel national et européen. Le juge applique la loi et l’interprète si besoin. Il n’a pas le pouvoir de l’écarter sinon au profit d’une norme supérieure. Il ne lui appartient pas d'en suspendre l'application hors les cas où la loi le lui impose.
Ainsi que l’illustre une actualité internationale trop abondante, la mission du juge ou du procureur ne peut être regardée comme légitime que si le magistrat est en situation de l’exercer à l’abri de pressions de quelque nature qu'elles soient et d'où qu'elles viennent. C’est pourquoi notre Constitution proclame solennellement l’indépendance de l’Autorité judiciaire et confère au chef de l’État le devoir de la garantir. Il est assisté à cette fin du Conseil supérieur de la magistrature dont il lui appartient de recueillir les avis et dont les attributions en matière de nomination et de discipline des magistrats, qui doivent encore être renforcées, visent précisément, dans l’intérêt du justiciable, à écarter toute suspicion à cet égard.
L’indépendance des magistrats suppose qu’ils se conforment à des obligations déontologiques particulièrement exigeantes. Le Conseil supérieur de la magistrature y veille. Chargé par le Parlement de réunir ces obligations déontologiques au sein d’un Recueil, de les rendre publiques et de les mettre à jour, le Conseil supérieur de la magistrature, au fil de ses mandatures successives, a toujours eu soin de rappeler aux magistrats l’impartialité, objective et subjective, à laquelle ils sont tenus.
Il n’existe pas de démocratie sans respect de la légalité garantie par la Justice. Il n’existe pas de Justice sans indépendance garantie par la Constitution. Il n’existe pas d'indépendance sans exigences déontologiques.