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Publié par Parolesdejuges

Sous peine d'innocence   (filmographie)

 

Le 1er mars 2017 sort en salle le film intitulé "Sous peine d'innocence", réalisé par Pierre Barnérias. (cf. ici page FB)

 

Le film raconte l'histoire - américaine - de Sévérino DIAZ, condamné en 1983 dans des circonstances judiciaires discutables à une peine minimale de 15 années de prison. Extensible sans limite.

Sévérino DIAZ affirme qu'il n'a pas commis le crime pour lequel il a été condamné.

 

Au coeur du film se trouvent les demandes successives de remise en liberté présentées par le condamné une fois les 15 années de prison exécutées.

En effet, dans le système judiciaire qui s'applique à sa situation, une commission peut, quand bien même la sanction minimale a été effectuée, refuser les remises en liberté. Que le condamné peut solliciter tous les deux ans. Et que la commission peut refuser à chaque fois sans limite de temps. Avec comme critère la (ou l'absence) de reconnaissance de culpabilité.

De fait, quand Sévérino DIAZ est libéré en 2008, il a passé 25 ans en prison. 15 ans pour le crime commis, et 10 années supplémentaires pour ne pas avoir admis sa culpabilité.

 

Le film, c'est aussi la rencontre entre Sévérino DIAZ et l’aumônier Pierre Raphaël qui gère avec une autre religieuse la Maison d’Abraham, lieu d'accueil pour des sortant de prison.

 

Ce film est intéressant à double titre.

 

Il l'est d'abord en ce qu'il nous montre certains côtés absurdes de la justice américaine. L'idée qu'un condamné effectue intégralement une peine puis, en dehors de tout critère de dangerosité, se voit refuser une remise en liberté au seul motif qu'il continue à se prétendre innocent nous paraît aussi étrange que inconcevable.

Et c'est d'autant plus incompréhensible que la décision de maintien en prison ne repose que sur ce seul critère : l'acceptation ou le refus du condamné de reconnaître son implication dans le crime pour lequel il a été condamné.

Si un homme est bien coupable, et est condamné pour cela, il n'en reste pas moins que c'est son droit de nier sa culpabilité.

Si son attitude peut éventuellement être prise en compte, c'est au moment du choix de la sanction après la déclaration de culpabilité. Il serait inadmissible de prendre en compte la négation de la participation une première fois au moment du choix de la sanction et, une seconde fois à l'expiration de la sanction prononcée pour justifier une prolongation de l'emprisonnement. Cela d'autant plus quand cette prolongation de peine peut durer sans limite de temps.

Imaginons maintenant que, comme cela arrive parfois et surtout aux USA, le condamné soit de fait innocent. (lire not. ici ici). Dans quelle situation, humainement, se trouve celui qui se sait innocent et à qui on demande de se reconnaître coupable pour pouvoir sortir un jour de prison ?

Quand tel est le cas, c'est d'une violence psychologique extrême. Il suffit de voir, dans le film, Sévérino Diaz et Pierre Raphael attendre au téléphone la réponse de la commission. Et chercher comment tenir le coup pendant les deux années suivantes.

 

Mais il l'est aussi parce qu'il vient questionner les pratiques française. Indirectement.

Bien sûr chez nous quand une peine est intégralement effectuée le condamné est remis en liberté. Seules les personnes extrêmement dangereuses psychiatriquement peuvent sous certaines conditions rester enfermées.

Mais c'est en cours d'exécution de peine que la problématique mise en avant par le film interroge aussi nos pratiques.

En effet, nombreux sont les juges d'application des peines qui expliquent que quand ils (ou le tribunal d'application des peines) doivent statuer sur une demande de libération conditionnelle ils prennent en compte, notamment, la reconnaissance ou non des faits.

Pourtant ce critère n'apparaît pas comme tel dans le code de procédure pénale (textes ici)

Quand cette non reconnaissance est retenue pour refuser une libération conditionnelle, il est nécessaire de se demander quel est le raisonnement qui est suivi.

La non reconnaissance est-elle considérée comme générant un risque spécifique de récidive ? Comme un manque d'empathie pour la victime ? Comme un échec annoncé des soins psychologiques considérés nécessaires ? Comme la marque d'une personnalité perturbée ? Ou, consciemment ou non, comme un nouvel affront envers la justice ?

Le débat est ouvert.

 

C'est pourquoi le film n'est pas seulement le récit d'une histoire judiciaire troublante dans un pays étranger.

Indirectement, cette histoire américaine nous interroge aussi.

Cela le rend doublement intéressant.

 

 

 

 

 

 

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